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Après sa formation « pythagoricenne » à Crotone, Numa devint roi des Latins belliqueux qu’il transforma en une nation religieuse et pacifique. Lorsqu’il meurt, pleuré de tous, son épouse Égérie se retire à Aricie, où elle entrave par ses plaintes le déroulement du culte de Diane. Mais elle est inconsolable, malgré les efforts de ses compagnes nymphes, et surtout du fils de Thésée, qui tente de la ramener à plus de mesure en lui proposant le récit de ses propres malheurs. (15, 479-496)
Hippolyte raconte à Égérie comment sa belle-mère, Phèdre, dépitée de voir ses avances repoussées, l’accuse auprès de Thésée d’avoir voulu abuser d’elle. Injustement condamné par Thésée, Hippolyte s’exile, mais en route vers Trézène, ses chevaux, affolés par un taureau prodigieux surgi soudainement de la mer, le précipitent sur un rocher, et le traînent sur le rivage où il meurt, dans des souffrances abominables. Ressuscité par Apollon, il est protégé par Diane/Cynthie/Artémis, la déesse qu’il a toujours vénérée. Celle-ci le métamorphose, vieillissant ses traits, changeant son nom en Virbius, et déplaçant en Italie son lieu de séjour. (15, 497-546)
Le récit d’Hippolyte/Virbius ne consola pas Égérie. Diane, apitoyée, la métamorphosa en une source intarissable. (15, 547-551)
L’esprit instruit par ces enseignements et d’autres encore,
Numa, dit-on, rentré dans sa patrie, avait accepté
les rênes de l’État, à la demande du peuple du Latium.
Heureux époux d’une nymphe, ayant les Camènes pour guides,
il enseigna à une nation farouche, habituée à la guerre,
les rites des sacrifices et l’orienta vers les arts de la paix.
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Lorsque, vieillard parvenu au terme de son règne et sa vie,
Numa s’éteignit, il fut pleuré par les matrones du Latium,
par le peuple et par les sénateurs ; car son épouse avait quitté la ville,
vivait cachée dans les forêts épaisses de la vallée d’Aricie
et ses plaintes et ses pleurs entravaient le culte de la Diane d’Oreste.
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Ah ! Que de fois les nymphes du bois et du lac lui déconseillèrent-elles
cette attitude et lui adressèrent-elles des paroles de consolation !
Que de fois, quand elle pleurait, le héros, fils de Thésée, lui dit :
« Arrête, calme-toi, tu n’es pas seule à devoir pleurer sur ton sort ;
regarde les malheurs des autres, compare-les aux tiens, que tu
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supporteras alors plus facilement ; je voudrais que d’autres exemples
que le mien puissent consoler ta peine ! Mais mon cas peut t’aider.
Je pense que tes oreilles ont entendu parler d’un certain Hippolyte,
que la crédulité de son père et la fourberie de sa belle-mère scélérate
ont conduit à la mort ; tu t’étonneras, et j’aurai du mal à le prouver,
mais cet homme c’est moi. Un jour, la fille de Pasiphaé prétendit
que j’avais tenté, en vain, de profaner le lit de mon père,
ce qu’elle voulait, et, inversant les rôles, m’attribua ce désir :
– par crainte d’être percée à jour ou plutôt dépitée de mon refus ? –
Mon père me condamna, malgré mon innocence il me chassa de la ville,
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et, au moment où je m’en allais, me maudit, m’accablant de sa haine.
En char, sur la route de l’exil, je me rendais à Trézène, chez Pitthée,
et déjà j’abordais le rivage de la mer de Corinthe,
quand la mer se souleva. On vit une énorme masse d’eau
s’arrondir et grandir, haute comme une montagne,
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qui se mit à gronder et à se fendre depuis son sommet.
Alors des ondes qui se brisèrent surgit un taureau
armé de cornes, qui dressa son poitrail dans l’air léger
et cracha par ses naseaux et sa large gueule des paquets de mer.
Mes compagnons sont épouvantés. Moi, préoccupé par mon exil,
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je restais l’esprit serein, lorsque mes fougueux coursiers
tournent leur encolure vers la mer : leurs oreilles se dressent,
leurs poils se hérissent, la crainte du monstre les trouble,
et ils précipitent le char sur des rochers escarpés. Je lutte en vain
pour maîtriser de la main les freins couverts de blanche écume
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et, penché en arrière, je tire vers moi en les tendant les rênes souples.
La fureur de mes chevaux n’aurait pourtant pas eu raison de mes forces
si une roue, là où elle tournait sans fin sur son axe, ne s’était brisée
et si elle n’avait volé en éclats en heurtant un tronc d’arbre.
Je suis éjecté de mon char, tandis que les rènes me retiennent :
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alors on pouvait voir mes chairs traînées vivantes à terre,
mes muscles accrochés à une souche, mes membres emportés,
ou retenus et laissés sur place, mes os se brisant à grand bruit,
mon âme expirant épuisée. On n’aurait pu reconnaître
aucune partie de mon corps : tout n’était qu’une plaie.
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Peux-tu vraiment, oses-tu comparer ton malheur au mien,
ô nymphe ? J’ai même vu le royaume privé de lumière,
et j’ai réchauffé mon corps meurtri dans les eaux du Phlégéthon.
Sans le remède efficace du fils d’Apollon, jamais la vie
ne m’aurait été rendue, mais, grâce à des herbes puissantes
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et à l’aide de Péon, je l’ai retrouvée, à la grande fureur de Dis.
Voulant éviter d’accroître par ma présence la haine due à cette faveur,
Cynthie place alors autour de moi une épaisse nuée.
Puis, pour assurer ma sécurité et la possibilité de paraître impunément,
elle me vieillit, ne me laissant aucun trait reconnaissable.
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Longtemps elle hésita à m’attribuer comme séjour la Crète
ou Délos. Elle renonce à Délos et à la Crète, m’installe ici
et m’ordonne en même temps d’abandonner mon nom,
qui pourrait évoquer celui des chevaux, et me dit :
“ Toi qui as été Hippolyte, sois maintenant Virbius ! ”
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Depuis lors, j’habite dans ce bois, je suis un des dieux mineurs,
je vis caché, sous la protection de la maîtresse à qui suis attaché. »
Pourtant les malheurs d’autrui ne peuvent soulager
les pleurs d’Égérie qui, couchée au pied d’une montagne,
ne cesse de fondre en larmes. Sa piété douloureuse
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finit par émouvoir la sœur de Phébus, qui fit de son corps
une fontaine fraîche, et de ses membres des ondes éternelles.
D’autres prodiges étonnants se produisirent, comme l’apparition, sous les yeux d’un laboureur tyrrhénien, de Tagès, un homme qui provenait de la métamorphose d’une motte de terre et qui enseigna aux Étrusques l’art de prédire l’avenir, comme aussi la métamorphose en un arbre vivant, de la javeline de Romulus plantée sur le sol du Palatin. (15, 552-564)
Cipus était un homme de guerre, qui constata un jour qu’il portait des cornes de cerf sur la tête. Au retour d’une bataille victorieuse, il voulut connaître le sens de ce prodige. Ayant appris par un haruspice que ces cornes le désignaient comme roi des Latins, et étant invité à entrer dans la ville pour y être sacré roi, il refusa catégoriquement ce destin. (15, 565-589)
Après avoir dissimulé ses cornes sous une couronne de laurier, il déclara au peuple et au sénat qu’il fallait exiler ou tuer un homme au front armé de cornes qui risque de devenir roi à Rome. Puis il exhiba ses cornes. Le peuple lui laissa sa couronne et se résolut à l’exiler, tout en lui octroyant comme récompense un terrain à l’extérieur des murs de la ville. (15, 590-621)
Cette forme nouvelle stupéfia les nymphes et le fils de l’Amazone,
tout autant que fut frappé de stupeur le laboureur Tyrrhénien,
quand il vit au milieu de ses champs une motte, signe du destin :
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elle se mit à bouger spontanément sans que personne ne l’agite,
elle prit bientôt forme humaine, cessant d’être une motte de terre,
et dévoila, en ouvrant sa bouche toute neuve, les destins futurs.
Les indigènes nommèrent ce personnage Tagès, qui fut le premier
à instruire le peuple étrusque dans l’art de découvrir l’avenir.
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Romulus ne fut pas moins étonné lorsque il vit tout à coup
se couvrir de feuillage sa javeline, qui s’était fixée sur le Palatin.
Dressée sur une racine nouvelle et non plus sur le fer enfoncé en terre,
ce n’était plus une arme, mais un arbre aux rameaux flexibles,
offrant un ombrage inattendu aux spectateurs étonnés.
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Cipus aussi s’étonna quand il vit ses cornes dans l’eau du fleuve,
car il les vit. Convaincu que cette image était fausse,
souvent il porta les doigts à son front et toucha ce qu’il avait vu.
Puis il cessa de mettre en cause ses yeux, et, un jour,
revenant victorieux après avoir soumis un ennemi,
il s’arrêta, et levant vers le ciel les yeux et les bras, il dit :
« Dieux du ciel, quel que soit l’événement qu’annonce ce prodige,
s’il est heureux, qu’il s’applique à la patrie et au peuple de Quirinus,
si c’est une menace, qu’elle soit pour moi. » Sur des autels de vert gazon,
dont il parfume l’herbe de fumée d’encens pour apaiser les dieux,
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il offre du vin sur des patères et consulte les entrailles palpitantes
de brebis immolées, pour y apprendre ce qu’elles lui indiquent.
L’haruspice étrusque les examina, et aussitôt
vit en elles des événements importants, assurément,
peu évidents toutefois. Alors, détournant son regard aigu
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des lobes de l’animal vers les cornes de Cipus, il dit :
« Salut, ô roi ! C’est bien à toi, Cipus, à toi et à tes cornes
qu’obéiront ce pays et les citadelles du Latium. Seulement toi,
sans retard, hâte-toi de franchir ces portes larges ouvertes.
Telle est la volonté des destins ; car, reçu dans la ville,
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tu seras roi et sans crainte tu garderas à jamais ton sceptre. »
Cipus fit un pas en arrière et détournant des murs de la ville
un visage farouche, il dit : « Ah ! Que les dieux écartent loin, bien loin
tous les présages de cette sorte ! Ce sera pour moi bien plus juste
de passer ma vie en exil que d’apparaître en roi au Capitole. »
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Il dit et convoque aussitôt le peuple et les graves sénateurs,
non sans s’être couvert d’abord les cornes du laurier de la paix.
Puis il prend place sur un talus élevé par ses valeureux soldats,
et, après avoir prié les dieux ancestraux selon les rites, il déclara :
« Il y a ici un homme qui, si vous ne le chassez pas de la ville,
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sera roi. Je vous dirai qui il est, par un signe, non par son nom :
il porte des cornes sur son front. L’augure vous avertit
que, s’il entre dans Rome, il imposera des lois à des esclaves.
Cet homme, en vérité, aurait pu franchir les portes ouvertes,
mais je m’y suis opposé, bien que nul ne soit plus proche de lui
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que moi-même. Vous, Quirites, écartez cet homme de la cité,
ou, s’il mérite ce traitement, liez-le avec de lourdes chaînes
ou faites cesser toute crainte par la mort d’un tyran fatidique ! »
Comme le murmure qui s’élève des denses forêts de pins, quand siffle
l’Eurus déchaîné, ou comme le grondement des vagues marines
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qu’on entend dans le lointain, ainsi se fait entendre le peuple.
Des paroles confuses montent des assistants qui s’agitent,
une seule pourtant domine : « Qui est-cet homme ? »
On regarde les fronts et on cherche les cornes en question.
Cipus reprend la parole et leur dit : « Voici celui que vous cherchez. »
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Contre la volonté du peuple, il enleva la couronne de sa tête,
et montra ses tempes, où apparaissaient les deux cornes
Tous baissèrent les yeux, poussèrent des gémissements
et ne regardèrent qu’à contre-cœur (qui l’eût cru ?) cette tête
illustrée par ses mérites. Ils ne supportèrent pas plus longtemps
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de voir cette tête privée d’honneur, et ils lui remirent sa couronne de fête.
Mais les notables, puisqu’il t’est interdit d’entrer dans la ville,
t’accordèrent à la campagne, Cipus, l’hommage d’une terre égale
à la surface que tu pourrais entourer d’un sillon avec une charrue
tirée par un attelage de bœufs, du lever au coucher du soleil.
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Ils font aussi sculpter des cornes rappelant cette figure étonnante,
sur une porte de bronze, des cornes destinées à traverser les siècles.
Numa... (15, 480). Ovide revient à Numa (voir ci-dessus, vers 15, 1-7), successeur de Romulus, réputé roi pacifique et religieux. Sans s’attarder, le poète mentionne son arrivée sur le trône de Rome, son union avec une nymphe, son rôle politique et religieux et sa mort. Deux sujets par contre vont retenir Ovide dans la suite (15, 487-551) : d’une part Égérie, la nymphe épouse de Numa, qui après la mort de son mari trouve refuge à Aricie ; d’autre part, à Aricie toujours, Virbius, qui n’était autre qu’Hippolyte, fils de Thésée.
époux d’une nymphe (15, 482). La nymphe en question était Égérie. Le rationaliste qu’est Tite-Live (1, 19, 5) rapporte que le roi feignait d’avoir des entrevues nocturnes avec cette divinité et que cette dernière lui servait de conseillère en matière religieuse : « C’était sur ses conseils, disait-il, qu’il instituait les cérémonies les plus agréables aux dieux, et qu’il établissait des prêtres spéciaux pour chaque divinité » (trad. G. Baillet). Mais certains auteurs, comme ici Ovide, font d’Égérie l’épouse du roi.
Camènes (15, 482). Les Camènes sont des divinités des fontaines et des sources, qui furent assimilées aux Muses grecques en raison de leur rôle d’inspiratrices et de prophétesses. À Rome, elles avaient « leur sanctuaire dans un bois sacré non loin de la Porte Capène (un peu au Sud du Caelius), à l’endroit où se trouvait également une chapelle d’Égérie » (P. Grimal), qui était l’une de ces Camènes et qui était aussi honorée dans les bois d’Aricie, près du lac de Némi, dont on va reparler dans un instant. – On a présenté plus haut (Mét., 14, 433-434) une autre Camène, Canens, la nymphe épouse de Picus. Parmi les Camènes célèbres, on comptait aussi Carmenta ou Carmentis, dont il a été longuement question dans les Fastes (1, 461-542, et 1, 617-636) à propos des Carmentalia, et qui « passait dans l’affabulation mythique pour la mère de l’Arcadien Évandre (Virg., Én., 8, 335-336) » (R. Schilling, Ovide. Les Fastes, Tome I, p. 108, n. 116).
Aricie (15, 488). Localité du Latium (aujourd’hui Ariccia), à 25 km au sud-est de Rome, au pied des monts Albains, où se trouvait un bois sacré autour d’un lac, le lac de Némi, avec un sanctuaire célèbre consacré à Diane (« la Diane d’Aricie »). La nymphe Égérie y avait également un culte, peut-être plus ancien que celui qu’on lui rendait à Rome. Le récit d’Ovide imagine qu’à la mort de son époux Numa, la nymphe était allée cacher sa douleur à Aricie, perturbant par ses plaintes et ses gémissements le culte de Diane.
Diane d’Oreste (15, 489). Les questions liées à ces cultes d’Aricie (Diane, Égérie, Virbius) ont été abordées, avec assez bien de détails, dans Ovide, Fast., 3, 261-284 (avec les notes) ; Fast., 6, 737-756 (avec les notes), ainsi que dans Virg., Én., 7, 761-782 (et les notes). On en reprendra ici l’essentiel. Les données essentielles de la légende d’Hippolyte sont bien connues. Fils de Thésée, adorateur d’Artémis, la déesse vierge, il repoussa avec horreur les avances de Phèdre, sa belle-mère, qui était la fille de Pasiphaé (vers 500). Phèdre l’accusa alors d’avoir voulu attenter à son honneur, et Thésée, crédule, souleva contre lui le courroux de Neptune. Un monstre marin épouvanta les chevaux du char du jeune homme, qui périt sur les rochers de la côte. En apprenant sa mort, Phèdre se pendit. Tel est le récit de base, qui présente toutefois une suite comportant un volet italique, qu’on trouve notamment dans les Fastes et les Métamorphoses (références ci-dessus). Hippolyte aurait été ressuscité par Esculape et transporté à Aricie par Artémis, où il aurait vécu sous le nom de Virbius. Quoi qu’il en soit, il est sûr que dans le bois sacré d’Aricie, près du lac de Némi, on vénérait non seulement Diane, mais aussi une nymphe nommée Égérie, ainsi qu’une divinité masculine, une sorte de génie indigène, nommé Virbius, dont la nature précise n’est pas claire. Dans le récit d’Ovide, son nom n’apparaîtra qu’au vers 545. Tous ces cultes latins, à l’origine, n’avaient strictement rien à voir avec l’histoire d’Hippolyte et de Phèdre. Ces développements italiques, totalement artificiels, sont le résultat de constructions savantes. Il est fort possible que l’introduction d’Hippolyte dans le culte de Diane d’Aricie soit due à un détail du rituel, qui interdisait l’accès des chevaux dans le bois sacré (Ovid., Fast., 3, 266). La nature même de ce Virbius d’ailleurs est énigmatique, et il n’est pas sans intérêt de relever que si Virbius est, pour Ovide, le nom que se donne Hippolyte, il est, pour Virgile (7, 761), le fils d’Hippolyte et d’Aricie.
D’après Serv., Aen., 2, 116 ; 6, 136 ; et Val. Flacc., 2, 303ff, ce serait Oreste qui aurait amené en Italie, à Aricie, une statue d’Artémis, qu’il aurait dérobée dans le sanctuaire de la divinité en Tauride (ancien nom de la Crimée). Mais selon les traditions grecques, cette idole « se trouvait, pour les Athéniens, dans le temple d’Artémis, à Halai (Attique), pour les Spartiates, dans celui d’Artémis Orthia, à Sparte » (J. Chamonard). Autant dire que chaque sanctuaire important d’Artémis revendiquait la possession de la statue.
héros, fils de Thésée (15, 492). Il s’agit d’Hippolyte (cité au vers 497), fils de Thésée et d’une amazone, dont la légende vient d’être rappelée dans la note précédente. C’est lui qui propose à Égérie le récit de ses propres malheurs (15, 493-546) pour ramener la nymphe à plus de mesure. Ce sera en vain.
Trézène... Pitthée (15, 506). Trézène est une ville d’Argolide, où régna Pitthée, un fils de Pélops et d’Hippodamie. C’était le grand-père de Thésée, dont il assura l’éducation, ainsi d’ailleurs que celle d’Hippolyte. Voir Mét., 6, 418. Sur les rapports entre Pitthée et Thésée et Hippolyte, voir les notes à Mét., 7, 402 à 404, qui traitent respectivement d’Égée et de Thésée.
compagnons (15, 514). Il s’agit des chevaux d’Hippolyte. Le lien qu’il entretient avec eux semble souligné par cette désignation inattendue.
nymphe (15, 531). C’est Égérie, qu’Hippolyte cherche à consoler par son discours des vers 493-546.
Phlégéthon (15, 532). Un des fleuves des Enfers. Voir notamment Virg., Én., 6, 265 et 6, 551.
fils d’Apollon (15, 533). Esculape/Aesclepios, fils d’Apollon et Coronis (pour la naissance, voir Mét., 2, 542-544 avec notes, et 2, 600-630). Sauvé par Apollon du sein de sa mère mourante, Esculape avait été confié par son père au Centaure Chiron, qui lui enseigna l’art de la médecine. Voir aussi Én., 7, 761-782, et Fastes, 6, 735-736.
Péon (15, 535). Médecin des dieux et des héros, chez Homère (Il., 5, 401 et 899), il fut souvent comme ici identifié à Apollon, dieu guérisseur, qui se voit responsable avec Esculape de la réssurection de Hippolyte.
Dis (15, 535). Dieu romain des enfers, assimilé à Hadès/Pluton. Voir Mét., 4, 438, avec des liens vers d’autres textes.
Cynthie (15, 537). La déesse honorée sur le mont Cynthe à Délos, c’est-à-dire Artémis/Diane, sœur d’Apollon/Phébus.
Crète ou Délos (15, 541-542). Lieux attachés respectivement à Hippolyte, qui avait vécu en Crète chez Thésée, et à Diane/Artémis, née à Délos.
pourrait évoquer celui des chevaux (15, 543). « Le nom grec du cheval - hippos - entre dans la composition du nom propre Hippolyte » (G. Lafaye).
Virbius (15, 544). Sur ce personnage, dont Ovide n’a pas donné le nom auparavant, cfr supra la n. au vers 489.
ondes éternelles (15, 551). Égérie est métamorphosée par Diane en fontaine. Pour d’autres métamorphoses en fontaines, on verra par exemple en 5, 409-437 le cas de Cyané ; en 5, 573-641 celui d’Aréthuse, et en 13, 885-897 celui d’Acis.
forme nouvelle... fils de l’Amazone (15, 552). La métamorphose d’Égérie en source, surprend ses compagnes, les Camènes et Hippolyte/Virbius, fils de Thésée et d’une Amazone.
laboureur Tyrrhénien... Tagès (15, 553-559). Abstraction faite de ce passage des Métamorphoses, la légende de Tagès nous est principalement connue par Cic., de diu., 2, 23, 50. Un certain Tarchon vit dans son champ, près de Tarquinies, une motte de terre prendre la forme d’un enfant, du nom de Tagès, qui passait pour le fils de Genius Iouialis. Doué d’une grande sagesse et de dons extraordinaires de divination, il enseigna aux Étrusques les règles de l’haruspicine (art divinatoire, spécialité étrusque par excellence). À sa mort, ses enseignements furent mis par écrit, et constituèrent le fond des livres étrusques concernant la divination (d’après P. Grimal). Ovide ici va évidemment mettre en avant ce qui concerne la métamorphose.
Romulus... javeline... (15, 560-564). On sait, par Plutarque (Vie de Romulus, 20, 6-7), qu’un jour Romulus, pour éprouver sa force, lança en direction du Palatin « du haut de l’Aventin un javelot dont le bois était de cornouiller. La pointe s’enfonça si profondément qu’on ne put, malgré de multiples tentatives, la retirer. La terre, qui était fertile, recouvrait le bois, qui jeta des pousses et donna naissance à une belle et grande tige de cornouiller. Les successeurs de Romulus conservèrent cet arbre comme un monument des plus sacrés, en firent un objet d’admiration et l’entourèrent d’un mur » (trad. R. Flacelière, Budé). Il y avait à Rome plusieurs arbres considérés comme sacrés. Le figuier Ruminal sous lequel la louve aurait allaité Romulus et Rémus était l’un d’entre eux (cfr notamment Ovid.., Fast., 2, 411-422).
Cipus (15, 565-621). Outre ce passage des Métamorphoses, Valère Maxime (Faits mémorables, 5, 6, 3) rapporte cette histoire, qui met en scène un certain Genius Cipus, un personnage romain (commandant d’armée, peut-être un préteur ?), d’époque inconnue mais ancienne.
cornes (15, 565). « Les cornes étaient pour les anciens un symbole de puissance » (G. Lafaye).
haruspice étrusque (15, 577). L’haruspicine, révélée par Tagès (cfr supra, 15, 552-559), était l’art divinatoire étrusque par excellence. Elle prétendait notamment pouvoir lire l’avenir dans les entrailles des victimes, en particulier dans le foie et ses lobes (les fibrae du texte latin) qui étaient l’objet d’un examen très attentif.
Salut, ô roi (15, 581). Pour bien comprendre les réactions de Cipus, il faut savoir qu’à cause de la tyrannie de Tarquin le Superbe, le dernier roi de Rome, les Romains avaient conservé une profonde aversion pour la royauté (odium regni). C’est ainsi que plusieurs grands personnages des débuts de la République romaine, comme Spurius Cassius, Spurius Maelius, Marcus Manlius, furent poursuivis, voire mis à mort, parce que accusés d’avoir voulu rétablir la royauté (adfectatio regni). Même César, lors du célèbre épisode des Lupercales de 44, a refusé la couronne royale que lui tendait Antoine. Et, comme on le sait, après la République, Rome n’a plus été dirigée par des rois, mais des empereurs. Pour une étude approfondie de ces problèmes, on se reportera aux deux gros volumes de Paul M. Martin, L’idée de royauté à Rome, Clermont-Ferrand, 1982-1994.
laurier de la paix (15, 591). Nous avons suivi dans notre traduction le texte (pacali... lauro) de Fr. Bömer et J. Chamonard. Le laurier, qui symbolait la victoire, signifiait aussi la paix qui la suivait (d’après G. Lafaye).
augure (15, 596). Il s’agit ici, au sens strict, d’un haruspice (supra, vers 577), mais le mot latin augur (augure) peut s’utiliser, au sens large, pour désigner tout qui prédit l’avenir.
hommage d’une terre (15, 617). C’était là (Plin., N.H., 18, 9) une récompense prestigieuse accordée à des chefs d’armée et à des citoyens. Elle fut attribuée à Horatius Coclès (Tite-Live, 2, 10, 12) et à Mucius Scaevola (Denys d’Halicarnasse, 5, 35, 1).
sur une porte de bronze (15, 621). L’histoire de Cipus serait donc une légende étiologique, destinée à expliquer l’origine d’une tête portant un casque orné de cornes, qu’on pouvait voir sur la porta Raudusculana, une porte du mur servien au pied de l’Aventin (d’après P. Grimal).