]> Ovide, Métamorphoses, 12, 1-145

Quelques évocations relatives à la guerre de Troie (12, 1-145)

 

Les Grecs à Aulis - Présage d’un serpent métamorphosé - Sacrifice d’Iphigénie (12, 1-38)

À Troie, Priam, loin de soupçonner le désastre qui se prépare, pleure la disparition de son fils Ésaque, tandis que mouille à Aulis la flotte des Grecs conjurés, retenue par des vents contraires. Un présage, sous forme d’un serpent bientôt métamorphosé en pierre, signale aux Grecs qu’ils détruiront Troie, après une guerre d’au moins neuf années. (12, 1-23)

Le devin Calchas apprend aux Grecs que Diane, en échange de vents favorables, exige l’immolation d’Iphigénie. Prête à se sacrifier, la jeune fille est finalement sauvée par la déesse apitoyée, qui lui substitue une biche. Ainsi les Grecs peuvent-ils gagner le rivage de Phrygie. (12, 24-38)

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Priam pleurait son fils Ésaque, ignorant que, pourvu d’ailes désormais,

il était toujours vivant ; et même, sur un tombeau portant son nom,

Hector et ses frères avaient apporté d’inutiles offrandes funèbres.

De cette triste cérémonie fut absent Pâris, qui, plus tard,

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à cause du rapt de son épouse, avait engagé sa patrie

dans une longue guerre ; mille vaisseaux conjurés

et toute la nation des Pélasges confédérés le poursuivent.

La vengeance n’aurait pas tardé, si la fureur des vents

n’avait rendu la mer impraticable et si les navires prêts au départ

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n’avaient été retenus en terre de Béotie, à Aulis la poissonneuse.

Là, au cours des préparatifs rituels pour un sacrifice à Jupiter,

lorsque les torches allumées eurent éclairé le vieil autel,

les Danaens virent ramper un serpent de couleur sombre

sur le tronc d’un platane, près du lieu où avait débuté la cérémonie.

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Au sommet de l’arbre se trouvait un nid abritant huit oiseaux.

Le serpent les saisit et les engloutit dans sa gueule avide,

avec leur mère qui volait autour de ses petits en perdition.

Tous restèrent interdits. Mais l’augure, fils de Thestor,

habile à prévoir le vrai, dit : « Nous vaincrons. Réjouissez-vous, Pélasges !

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Troie tombera, mais longue sera la durée de nos efforts ».

Et il explique que les neuf oiseaux présagent neuf années de guerre.

Le serpent, là où il était, enlacé aux verts rameaux de l’arbre,

est transformé en pierre, en un rocher à son image.


Nérée continue de se déchaîner dans les eaux d’Aonie

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et empêche le transport des guerriers. Il est des gens qui croient

que Neptune épargne Troie, parce qu’il a construit les murs de la cité.

Mais tel n’est pas l’avis du fils de Thestor ; car il sait, et il ne le cache pas,

que le sang d’une vierge doit apaiser la colère de la déesse vierge.

Quand l’intérêt public eut triomphé de l’amour paternel, et le roi du père,

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quand, parmi les officiants éplorés, Iphigénie se tint debout

devant l’autel, prête à offrir son sang de vierge, la déesse céda :

elle répandit un nuage devant les yeux des assistants,

et on rapporte que, durant l’office sacré, parmi la foule en prière,

elle transforma la fille de Mycènes en une biche mise à sa place.

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Alors, dès que cette immolation destinée à l’apaiser eut satisfait Diane,

la colère de la mer cessa, en même temps que celle de Phébé.

Les mille vaisseaux, poussés à l’arrière par le souffle des vents,

s’installent, après de multiples épreuves, sur le littoral de Phrygie.

 

Devant Troie : Protésilas et Hector - Cygnus, métamorphosé en cygne, et Achille (12, 39-145)

La Renommée, Fama, du haut de sa demeure aux confins de l’univers, lieu de convergence et de transmission de nouvelles, vraies et fausses, séjour aussi d’abstractions personnalisées, observe et diffuse tout ce qui se passe dans l’univers. (12, 39-63)

Ainsi annonce-t-elle en Phrygie l’arrivée des vaisseaux grecs, que les Troyens attendent de pied ferme. Dès les premiers engagements sont évoqués Hector et Achille, les deux adversaires les plus représentatifs de l’Iliade. Hector abat Protésilas, cependant qu’Achille s’acharne en vain contre Cygnus. (12, 64-81)

En effet, Cygnus doit à son père Neptune d’être invulnérable aux traits. Achille, peu accoutumé à l’échec, énumère tous ses hauts faits depuis le début de l’expédition contre Troie ; il teste ses capacités en tuant l’obscur Ménétès, qui se trouvait devant lui, et quand il s’est rassuré, il retire le trait du corps de sa victime. Mais les traits qu’il lance contre Cygnus restent toujours sans effet. Finalement, il poursuit et coince contre un rocher son adversaire, qui lui échappe une fois de plus en étant métamorphosé en cygne par Neptune. (12, 82-145)

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Il existe au centre de l’univers un lieu situé entre les terres,

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les mers et les régions célestes, aux confins de notre monde triple.

De là on voit ce qui se passe partout, même dans les lieux éloignés ;

toutes les voix y pénètrent au creux d’oreilles réceptives : domaine

de la Renommée. Ce sommet qu’elle a choisi pour demeure,

elle l’a doté d’innombrables accès et de mille trous forés dans le toit.

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Pas une seule porte n’en ferme les entrées : nuit et jour,

la demeure est ouverte. Tout entière en airain sonore,

elle vibre de partout, renvoie les sons et répète ce qu’elle entend ;

aucun calme ne règne à l’intérieur et nulle part le silence.

Ce ne sont pas vraiment des cris, mais un sourd murmure,

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comme celui des flots de la mer, quand on l’entend de loin,

ou comme le bruit des grondements lointains du tonnerre,

quand Jupiter fait se heurter les sombres nuages.

Les salles sont pleines de foule, peuple léger, qui va et vient.

Partout se répandent des nouvelles, mélange de faux et de vrai,

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et partout mille rumeurs confuses circulent et se répètent.

Certains de ces propos emplissent des oreilles vides,

d’autres portent ailleurs ces récits. Ainsi croît l’affabulation,

et chaque nouvel intervenant en rajoute à ce qu’il a entendu.

C’est là que séjournent la Crédulité, l’Erreur irréfléchie,

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la Joie factice et les Terreurs désolées, la Révolte prête à éclater

et les Chuchotements d’un locuteur peu digne de foi.

Tout ce qui se passe dans le ciel, et sur mer, et sur terre,

la Renommée le voit et elle enquête dans le monde entier.


Elle avait proclamé la nouvelle de l’arrivée des vaisseaux grecs,

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chargés de vaillants guerriers. Lorsque se présente l’ennemi en armes,

il est attendu de pied ferme : les Troyens défendent leurs accès

et surveillent le rivage. Comme l’a décidé le destin, Protésilas,

tu tombes le premier sous la lance d’Hector ; les Danaens paient cher

les combats engagés et la mort de ce héros leur découvre Hector.

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Les Phrygiens aussi, à l’abondance du sang versé, ont compris

ce que pouvait le bras des Achéens. Déjà le rivage de Sigée

était rouge de sang ; déjà Cygnus, né de Neptune, avait livré

mille héros au trépas ; déjà Achille, du haut de son char, pressait

tous les rangs ennemis, qu’il décimait avec sa lance du Pélion.

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À travers les lignes, il cherche Cygnus ou Hector,

il rencontre Cygnus – Hector avait été remis à dix ans plus tard.

Alors Achille stimula ses chevaux, dont la blanche encolure

supportait le joug. Dirigeant son char contre l’ennemi

et agitant les traits que brandissaient ses bras, il dit :

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« Qui que tu sois, jeune homme, le fait d’avoir été égorgé

par Achille d’Hémonie te consolera de mourir ! ».


L’Éacide n’en dit pas plus : sa lourde pique suit ses paroles ;

mais sans que son trait assuré n’ait dévié, la pointe de fer

qu’il lança n’eut aucun effet, et, tel un trait émoussé,

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elle ne fit que s’écraser sur la poitrine de Cygnus.

« Fils de déesse, car déjà tu m’es connu grâce à la Renommée, »

dit Cygnus, « pourquoi t’étonner que je sois exempt de blessure ? »

Achille s’étonnait en effet. « Ni ce casque fauve, que tu vois,

orné de crins de cheval, ni ce bouclier creux pesant à mon bras gauche,

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ne sont pour moi une aide ; je n’en attends que la parure ;

Mars aussi porte des armes dans ce but ! Si l’on me retire

cette protection, je m’en sortirai toutefois sans blessure.

C’est important d’être issu, non d’une Néréide, mais du roi

qui règne sur Nérée et ses filles et sur tout l’océan. »

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Cela dit, Cygnus envoya sur l’Éacide un trait qui devait se fixer

sur la courbure de son bouclier, et qui perça le bronze et le cuir,

les neufs premières peaux de bœuf, mais resta arrêté par la dixième.

Le héros l’arracha et de sa main puissante lança à nouveau

un trait redoutable. Une fois encore, le corps de son adversaire

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resta intact, sans blessure. Un troisième trait ne réussit pas

à atteindre Cygnus, qui était là, découvert, s’offrant aux coups.

Achille brûle de rage, tel, dans l’arène d’un cirque, un taureau

aux cornes redoutables qui fonce sur les capes de couleur pourpre

qui l’excitent et comprend que ses coups sont esquivés.

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Le héros vérifie toutefois si le fer du javelot n’a pas quitté sa hampe,

mais il restait bien fixé au bois. Achille se dit : « Ma main manque-t-elle

donc de vigueur, et sa force de jadis a-t-elle disparu en un instant ?

Elle était grande en tout cas quand je fus le premier à ébranler

les remparts de Lyrnèse ou quand j’ai noyé dans leur sang

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les gens de Ténédos et de la Thèbe d’Éétion, ou quand

s’empourprèrent les flots du Caique lors du massacre du peuple

et lorsque Télèphe à deux reprises éprouva l’effet de ma lance.

Ici aussi, tous ces morts entassés que j’aperçois sur le rivage,

témoignent de la valeur qu’avait et qu’a toujours mon bras. »

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Il parla et, comme s’il avait peine à croire en ses exploits passés,

il envoya contre Ménétès, un simple Lycien qui était en face de lui,

un épieu qui lui transperça la poitrine et sa cuirasse protectrice.

Tandis que le crâne du moribond heurtait lourdement la terre,

le même Achille retira son trait de la blessure encore chaude et dit :

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« Voici la main, voici le javelot avec lequel je viens de l’emporter ;

je les utiliserai aussi contre lui ; puisse cela finir de la même façon ! »

Ainsi dit-il. Puis il vise Cygnus ; le trait de frêne ne dévie pas,

n’a pas été évité et s’est mis à vibrer dans l’épaule gauche du héros,

avant d’être repoussé, comme par une pierre dure ou un mur.

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Cependant à l’endroit du coup, Achille avait vu Cygnus

marqué par une tache de sang, mais il s’était réjoui en vain :

il n’y avait pas de blessure, et ce sang était celui de Ménétès !

Alors, tout frémissant, il se précipita du haut de son char

et, tandis que, armé de sa brillante épée, il affronte de face

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son adversaire insouciant, il constate que sa lame a percé

le bouclier et le casque, mais s’abîme ensuite sur un corps dur.

Il ne le supporte plus, reprend son bouclier, et du pommeau de son épée,

frappe trois, quatre fois son adversaire au visage et au creux des tempes.

Cygnus recule. Achille le suit, le presse, l’ébranle, le bouscule,

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l’étourdit, ne lui laissant aucun répit. Cygnus est en proie à la peur,

des ténèbres flottent devant ses yeux et, marchant à reculons,

il heurte une pierre qui lui fait obstacle au milieu du champ.

Achille le pousse contre cette pierre ; de toute sa force,

il le renverse sur le dos et le maintient cloué au sol.

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Alors lui écrasant durement la poitrine avec son bouclier et ses genoux,

il lui arracha les lanières du casque, qu’il lui passa sous le menton,

le pressa, l’étrangla, lui coupant la respiration et le souffle.

Il se préparait à dépouiller le vaincu, quand il voit

que celui-ci a abandonné ses armes ; le dieu de la mer

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l’a transformé en l’oiseau blanc, dont il portait naguère le nom.

 

Table des matières

 

Notes

Priam... Ésaque (12, 1). Transition servant à introduire quelques épisodes relatifs à la guerre de Troie. L’histoire d’Ésaque (11, 762) est racontée par Ovide en 11, 749-795.

Pâris... (12, 4-6). Allusion au rapt d’Hélène, l’épouse de Ménélas, par Pâris/Alexandre, un fils de Priam. Cette légende célébrissime provoqua la guerre de Troie, évoquée dans les vers suivants. Dans toute cette partie des Métamorphoses, Ovide s’inspire beaucoup de l’Iliade d’Homère, en faisant généralement de simples allusions, tant les légendes étaient connues. Mais il s’inspire aussi des successeurs d’Homère, les poètes « cycliques », et aussi des poètes tragiques, pour les épisodes non traités par Homère.

Pélasges... Aulis... (12, 7-10). À la suite du rapt d’Hélène par Pâris, les Grecs (appelés par Homère Achéens, ou Danaens, et ici par Ovide Pélasges, du nom d’un peuple primitif qui avait occupé la Grèce), s’étaient confédérés sous le commandement en chef d’Agamemnon de Mycènes, à la demande de son frère Ménélas, pour aller récupérer Hélène. Les troupes se rassemblèrent à Aulis, un port de Béotie. Mais Agamemnon offensa Artémis/Diane, laquelle, pour le châtier, empêcha les vents de souffler et la flotte de prendre la mer.

un serpent... (12, 11-23). Le présage du serpent et son interprétation sont directement inspirés d’Homère, Iliade, 2, 302-330, où Ulysse l’évoque pour rendre courage aux Grecs fatigués par leur long siège devant les murs de Troie.

fils de Thestor... (12, 18). Le fils de Thestor est le devin Calchas, très présent dans l’Iliade d’Homère, comme dans l’Iphigénie en Aulide d’Euripide.

Nérée (12, 24). Nérée, un dieu marin, père des Néréides (cfr 11, 361), désigne ici la mer, par métonymie.

Aonie (12, 24). L’Aonie, nom mythique de la Béotie, désignant ici le détroit de l’Euripe, séparant Aulis en Béotie de Calchis en Eubée.

Neptune (12, 25-26). Poséidon/Neptune, frère de Zeus/Jupiter et souverain des mers. Il avait, avec Apollon, aidé Laomédon à ériger les murs de Troie (Voir n. à 11, 195).

sang d’une vierge... la déesse... (12, 27-38). Le récit du sacrifice d’une vierge, la fille de Mycènes (v. 34), c’est-à-dire Iphigénie (v. 30), la fille qu’Agamemnon devait sacrifier à la déesse (Diane/Artémis/Phébé, v. 35 et 36), et celui de son sauvetage par Diane, sont des thèmes posthomériques, devenus canoniques depuis Euripide et son Iphigénie à Aulis. Ovide se borne à de simples allusions, la légende étant très connue. La substitution d’une biche par Diane apitoyée est donc une métamorphose de plus dans le recueil d’Ovide. On songera à propos du sacrifice d’Iphigénie au célèbre passage de Lucrèce, 1, 80-101.

Phrygie (12, 38). Sur le rivage proche de la ville de Troie.

aux confins de notre monde triple (12, 40). La formule du monde triple (triplicis confinia mundi) se retrouvera dans Mét., 15, 859 (mundi regna triformis).

Renommée (12, 43). Cette personnification de la Renommée, ou Fama, évoquée dans les vers 39-63, peut être rapprochée d’autres passages où Ovide imagine le séjour de l’Envie (Inuidia) en 2, 760-796 ; de la Faim (Fames) en 8, 788-808 ; du Sommeil (Somnus) en 11, 592-615). Voir surtout Virgile, Én., 4, 173-195, avec note.

Crédulité... (12, 59). Ici commence l’énumération d’une suite d’allégories, en quelque sorte secondaires, accompagnant la Renommée. Certaines d’entre elles sont sans doute des trouvailles d’Ovide.

Protésilas... Hector (12, 67-69). Protésilas, héros thessalien, serait le premier Grec à avoir perdu la vie en débarquant à Troie, frappé par Hector, le fils aîné de Priam, le plus vaillant des Troyens. Un oracle avait prédit que le premier homme qui débarquerait trouverait une mort immédiate. Protésilas se dévoua et périt de la main d’Hector, selon la version que suit ici Ovide. Ce Protésilas venait d’épouser Laodamie, juste avant son départ pour Troie.

Sigée (12, 71). Le Sigée (Sigeion) était un promontoire de la Troade, au nord-ouest de Troie (voir 11, 197).

Cygnus (12, 72). Ovide a déjà évoqué deux fois dans son ouvrage un personnage nommé Cygnus, qui fut métamorphosé en cygne. D’abord en 2, 367-380, où un Cygnus, roi des Ligures, ne peut se consoler de la mort de Phaéton, puis en 7, 371-381, où un Cygnus, un enfant passablement capricieux, est transformé en cygne. On verra aussi 12, 580-583, où Cygnus, l’adversaire d’Achille, est présenté comme l’oiseau de Phaéton.

lance du Pélion (12, 74). Homère, Iliade, 16, 141-144, parle d’une lourde pique en bois du Pélion (mont de Thessalie, proche de l’Ossa), pique qu’Achille est seul à pouvoir brandir, et qui avait été offerte par le centaure Chiron à Pélée, le père du héros.

dix ans plus tard (12, 76). Hector tombera de la main d’Achille, presque à la fin du siège qui dura dix ans, comme le raconte le début du chant 22 de l’Iliade.

Éacide (12, 82). Désigne Achille, qui était le petit-fils d’Éaque, père de Pélée.

Néréide... (12, 93-94). La mère d’Achille, Thétis, est la fille de Nérée, dieu marin subalterne par rapport à Neptune, le père de Cygnus.

Lyrnèse (12, 109). Lyrnèse est, tout comme Thèbes (vers 110), une ville de Mysie.

Ténédos (12, 110). Ténédos est une île de la mer Égée, proche du rivage de Troie (voir Virg., Én., 2, 21 ; et aussi Mét., 1, 515).

Thèbe d’Éétion (12, 110). Thèbe (ou Thébé) sous le Placos, où régnait Éétion, le père d’Andromaque, est, comme Lyrnèse, une ville de Mysie. C’étaient des cités alliées de Troie.

Caïque (12, 111). Le Caïque est un fleuve de Mysie (cfr Mét., 2, 243, et 15, 277). Depuis Homère, les lieux qui viennent d’être cités, font partie du catalogue des conquêtes attribuées à Achille. Elles seront du reste rappelées par Ulysse en Mét., 13, 171-175.

Télèphe (12, 112). Fils d’Héraclès/Hercule et de l’Arcadienne Augé, une prêtresse d’Athéna que son père avait vouée à la virginité, Télèphe était né en cachette et avait été exposé sur le mont Parthénios ; nourri par une biche, il avait été recueilli par des bergers. Selon une version de leur légende, Augé et Téléphe qui avaient été enfermés dans un coffre et jetés à la mer échouèrent en Mysie, à l’embouchure du fleuve Caïque. Ils furent recueillis par le roi de Mysie Teuthras, qui épousa la mère et adopta l’enfant.

Certains récits rapportent que les Grecs, en route vers Troie, se trompèrent de route et voulurent s’emparer de la Mysie. Télèphe se battit contre eux et fut blessé par la lance qu’Achille avait reçue de Chiron, et qui provoqua chez lui une blessure persistante. Un oracle lui apprit que sa blessure ne pourrait être guérie que par celui qui la lui avait infligée.

Ayant reconnu leur erreur, les Grecs conclurent une trève avec les Mysiens et retournèrent à Aulis, d’où ils repartirent une seconde fois, plus tard, après le sacrifice d’Iphigénie. Comme Télèphe avait besoin d’Achille pour être guéri et que, par ailleurs, les Grecs avaient besoin de Télèphe pour trouver le chemin de Troie (un oracle ayant annoncé que lui seul pourrait permettre aux Grecs de conquérir Troie), on trouva un terrain d’entente. Achille en passant sa lance sur la plaie persistante de Télèphe le guérit, et Télèphe, qui avait épousé une fille de Priam, se borna à guider les Grecs vers Troie avant de regagner la Mysie, sans prendre part à la guerre. Cfr Hygin, Fab., 99-101 et Apollodore, Epitomé, 3, 17-20.

Ménètès (12, 116). Ce Lycien est une invention d’Ovide, qui emprunta peut-être ce nom à Virgile, Én., 5, 160 ou 12, 517.

lui (12, 120). Il s’agit de son adversaire Cygnus.